• 059 - Louis Bouilhet (1822-1869) - La Louve

    059 - Louis Bouilhet (1822-1869) - La Louve

    Marcia, la vieille louve,
    Au fond de son antre couve
    Plus d’une jeune beauté,
    Et, quand la rue est obscure,
    Répand au loin, dans Suburre,
    Son fol essaim qui murmure
    Par les chaudes nuits d’été.

    Elle a la belle Grecque, enivrante sirène,
    La fille de Lesbos aux soupirs cadencés,
    Qui suspend ses doigts blancs à sa lyre d’ébène,
    Et danse aux carrefours la danse ionienne,
    Avec un bandeau d’or sur ses cheveux dressés.

    Elle a l’ardente Latine,
    Qui sous une mitre incline
    Son front bruni du soleil,
    Nymphe au sourire magique,
    Glissant sous le blanc portique,
    Avec sa fauve tunique
    Et son brodequin vermeil.

    Elle a pour nos plaisirs, la Gauloise superbe,
    Le front ceint de gui pâle, aux feuillages amers ;
    Son pied nerveux bondit sans faire plier l’herbe.
    Ses longs cheveux épars semblent l’or d’une gerbe,
    Et son regard farouche est bleu comme les mers.

    Elle a ses négresses folles
    Qui, sur leurs noires épaules,
    Enlacent des serpents verts.
    Elle a l’Arabe indolente
    Qui, la nuit, dort sous la tente,
    Et le jour boit, haletante,
    À la source des déserts !

    Mais la plus belle, amis, c’est la blanche Chrétienne,
    Qui pleure et ne veut pas, et rougit tour à tour,
    Et qui de son Dieu mort pressant l’image vaine,
    Demande à deux genoux les tigres de l’arène,
    Quand on la jette nue aux baisers de l’amour !

    Extrait du recueil "Festons Et Astragales" 1859


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