• 020 - Ephraïm Mikhaël (1866-1890) - Dimanches Parisiens

    020 - Ephraïm Mikhaël (1866-1890) - Dimanches Parisiens

    Sous le ciel gris lavé d'opale
    Et qu'un soleil aux rayons lents
    Poudre d'or vaporeux et pâle,
    Elles vont à pas nonchalants ;

    Roses de froid sous les voilettes
    Elles passent, laissant dans l'air
    Une douce senteur de violettes
    Mourantes, et de blonde chair.

    Elles ne vont ni vers l'église
    Où, sur les mystiques autels,
    L'encens qui monte symbolise
    L'élan des esprits immortels ;

    Ni vers les discrètes alcôves
    Où le mousseux déroulement
    Des rideaux et des tapis fauves
    Ruisselle langoureusement.

    Sur les promenades banales
    Elles vont montrer leurs velours
    Et aussi les richesses hivernales
    Des manteaux orgueilleux et lourds.

    Elles passent, frêles poupées
    Aux yeux cruellement sereins,
    Adorablement occupées
    A bien cambrer leurs reins,

    A faire entrevoir leur chair d'ambre
    Et leurs cheveux d'or blond ou roux,
    Et, sur le verglas de Décembre,
    Leur robe a de royaux froufrous.

    Mais le long dimanche, plus triste
    Que les plus monotones nuits,
    Dans leurs yeux de froide améthyste
    A enflammé la fièvre des ennuis.

    O promeneuse des jours blêmes
    D'hiver et des dimanches longs,
    Nous, les chiffonneurs de poèmes,
    Mignonnes, nous vous ressemblons,

    Et, sans amour et sans prières,
    Nous allons montrer, indolents,
    Notre manteau de rimes fières
    Qui fait des froufrous insolents.

    Mais un ennui ensommeille
    Notre marche lente à travers
    Une existence égale, et pareille
    Aux dimanches gris des hivers.

    Extrait du recueil "Poésies Complètes" 1890


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