• 007 - Alexandre Weill (1811-1899) - Un Peuple Athée

    007 - Alexandre Weill (1811-1899) - Un Peuple Athée

    Eh bien, non ! Je suis vieux, mais je ne puis me taire.
    Dussent tous les démons du ciel et de la terre
    Former un cercle autour de mon chancelant corps,
    Excitant contre moi les vivants et les morts,
    Pour me faire exiler, expulser de ce monde,
    Je n'en crîrais pas moins : Fils d'une race immonde,
    N'ayant rien du lion, ni de l'aigle au haut vol,
    Attachés à la chair, comme un manant au sol,
    Hommes, vous n'êtes plus que des bipèdes mâles !
    Étalons bien entraînés pour saillir des cavales !
    Grands parleurs ! Vous avez, avec des airs bénins,
    Des ventres de géants et des cerveaux de nains !
    Et vous êtes les fruits d'une impure semence,
    Pleins de vin de vertige et de chair de démence !

    Vous vous croyez de forts hommes ; en niant Dieu,
    Vous avez l'air de dire : Où perche-t-il, ce feu !
    Moteur de l'univers, vengeur de toute offense,
    Comblant de biens tous ceux qui prennent sa défense,
    Et qui, sur le méchant, du haut du firmament,
    Fond comme un coup de foudre et le broie en ciment ?

    Mais l'athée est déjà puni pour être athée !
    Il louche du cerveau. C'est une ârne ratée !
    Il est aveugle-né, ne voyant pas le ciel,
    Et le brillant soleil, son astre essentiel.
    Et s'il n'en sentait pas la chaleur coutumière,
    Il dirait qu'il fait nuit et nirait la lumière.
    Il crèverait les yeux, s'il pouvait, à tous ceux
    Qui se baignent la vue au feu clair et mousseux
    De cet astre divin, qui nous charme la vie.
    Et qui fait de l'aveugle un être plein d'envie.

    La justice de Dieu remonte bien plus haut.
    Dès sa naissance, un homme a déjà ce qu'il faut,
    Ou comme châtiment, ou comme récompense,
    Selon ses actions, ou selon ce qu'il pense !
    L'athéisme est l'effet et non la cause. Il est
    Lui-même un châtiment, de l'enfer un reflet.
    L'athée est incapable, il est presque un infirme ;
    Il nie, il démolit. Il n'agit, ni n'affirme.
    Il vit toujours en rêve, et sans se réveiller.
    Rien par enthousiasme, ou pour s'émerveiller.
    Nul athée ouvrier n'a jamais fait une oeuvre !
    Ni ne sera jamais qu'un habile manoeuvre.
    Un peuple athée agit comme un peuple d'enfants.
    Bien moins intelligent qu'un troupeau d'éléphants,
    Il crie, il chante, il rit, il jure et se démène ;
    Il est gai, sage même, au moins une semaine ;
    Puis soudain, sans raison, il fait un bond, un heurt.
    Et crac ! De chute en chute il dégringole et meurt.

    Extrait du recueil " Eclairs Tonnerres Et Ondées" 1886


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